lundi 23 janvier 2012

[Traduction] Qu'est-ce qui ne va pas avec les oeufs ?

(Traduction de l'article de Maya Shlayen, "What’s wrong with eating eggs?")


Elevage


Toutes les poules utilisées pour la ponte – incluant les poules d’arrière-cour et soi-disant ‘plein-air’ – débutent leur vie dans un endroit appelé un couvoir (NDT : même si on peut raisonnablement avancer que la majorité des poules naissent dans un couvoir, ce n'est néanmoins pas le cas pour toutes les poules.)


Lorsque les oiseaux sont mis au monde pour la ponte dans ces endroits, la moitié d’entre eux sont nés mâle. D’aucune utilité pour l’industrie des œufs, et incapables de grandir assez vite pour être profitable pour la viande (une autre souche d’oiseaux, connus sous l’appellation ‘poulets de chair’, est utilisée à cette fin), les poussins mâles sont séparés de leurs sœurs et immédiatement tués. Les méthodes les plus courantes d’abattage consistent notamment à broyer leurs corps, ou les jeter – encore vivants et conscients – dans des poubelles géantes, où on les laisse mourir de faim et/ou de suffocation.

 Les coqs (poussins mâles), d’aucune utilité pour l’industrie des œufs, sont ‘écartés’ comme déchet, mourant de faim et/ou suffocant.


Pour chaque poule pondeuse existante, il y a un poussin mâle qu’on a fait venir au monde, seulement pour être immédiatement privé de vie.


De beaucoup de façons, l’abattage des poussins mâles dans les couvoirs illustre vivement ce qui ne va pas dans notre relation avec les non-humains. Les normes sociales et légales en vigueur encadrant les non-humains sont telles que leurs vies n’ont aucune valeur intrinsèque ; ils ont seulement une valeur économique. Leurs vies ne valent que l’argent qu’ils permettent d’engranger – pour nous. Lorsqu’aucun profit ne peut être tiré en leur permettant de vivre, nous les ‘écartons’ immédiatement, comme des serviettes sales. 


Utilisation


Le poulet domestique est un descendant direct d’un oiseau connu sous le nom de Coq Sauvage, dont on pense qu’il soit originaire d’Asie du Sud-est.


Contrairement au Coq Sauvage, qui ne pond que quelques œufs par an, les poules domestiques ont été manipulées par les humains pour pondre jusqu’à 300 œufs (non fécondés) par an. Pour une poule, pondre un œuf non fécondé est l’équivalent biologique de la menstruation des femmes humaines – c’est ce que font leurs corps en absence de fécondation. Puisque le corps féminin normal (dans une tranche d’âge particulière) est supposé être prêt pour concevoir, et puisque la conception exigerait de transmettre des nutriments au zygote/fœtus/bébé, le corps féminin est continuellement chargé de nutriment supplémentaire qui, en l’absence de conception, est alors « relâché » (via la menstruation ou la ponte d’un œuf non fécondé). Par exemple, les femmes humaines en âge de reproduction ont besoin de 18mg de fer quotidiennement, comparé aux hommes (et femmes par encore en âge de reproduction) qui n’ont seulement besoin de 8 mg quotidiennement. Du fer supplémentaire est requis pour compenser les pertes chaque mois.

Tout comme un flux menstruel élevé représenterait un fardeau pour la santé d’une femme humaine, le taux astronomiquement élevé de ponte représente un fardeau pour la santé des poules. Le calcium en particulier semble être perdu par la ponte élevée, ce qui expliquerait pourquoi une mauvaise santé des os est courante.

(NDT : ces paragraphes concernant le rythme de ponte sont incorrects d'un point de vue biologique. Voir la correction détaillée dans le commentaire laissé suite à l'article)

Ce dilemme – notre désir d’obtenir autant d’œufs que possible vs la santé des poules et leur autonomie physique – est un exemple classique du problème de l’utilisation animale et de la domestication en général. Toutes nos utilisations d’animaux – peu importe si c’est « humain » -- impliquent nécessairement de brader leurs intérêts (peu importe leur importance) pour notre gain. La domestication est un contrat social que les animaux ne signent pas (nous les amenons dans ce bourbier), et qui exige nécessairement une dynamique d’exploitation entre eux et nous. Nous les faisons venir au monde comme des êtres vulnérables (les animaux ‘domestiqués’ ne pourraient pas survivre de manière indépendante dans la nature), et ensuite nous commençons leur exploitation pour diverses raisons.


Les corps des non-humains n’existent pas pour l’utilisation et la gratification des humains. Nous ne pouvons pas justifier la ‘domestication’ et l’utilisation des corps d’animaux vulnérables pour notre profit, pas plus que nous pouvons justifier les abus sexuels sur enfants. Tout comme il n’y a pas de manière « juste » ou « compassionnelle » pour molester les enfants, il n’y a pas de manière « non abusive » d’exploiter des animaux vulnérables pour le profit humain.


Si vous vous occupez de poules secourues, faites leur une faveur et ouvrez leurs propres œufs devant elles – elles les mangeront ! Manger leurs propres œufs permet aux poules de regagner beaucoup des nutriments que leurs corps perdent en étant forcées de pondre tant d’œufs au départ. Manger leurs oeufs (les humains) – même dans des situations d’arrière-cour – est problématique car cela les prive de nutriments dont elles bénéficieraient.


Traitement


Bien qu’un meilleur traitement ne résoudrait pas le problème basique qu’est l’utilisation des non-humains comme moyens pour nos fins, la réalité est que toute ‘production’ d’œufs – incluant ‘plein-air’, ‘au sol’, etc – implique la torture de poules.


La raison est simple : les animaux sont des marchandises économiques. Mieux les traiter – en leur donnant plus d’espace, un accès à l’extérieur, etc – couterait beaucoup d’argent. Dans un monde de 7 milliards d’humains affamés, il n’y a tout simplement aucune manière abordable de ‘produire’ assez d’œufs tout en traitant les poules ‘soigneusement’.


La méthode de ‘production’ d’oeufs la plus courante est le système de cage, où les poules sont maintenues dans des cages en grillage métallique. Etant donné l’équivalent d’une feuille de papier sur laquelle vivre leur vie entière, le stress psychologique extrême de la surpopulation conduit souvent à des coups de bec, à des bagarres, et même au cannibalisme. Leurs pattes et leurs têtes se retrouvent souvent coincés entre les grilles des cages, entrainant chez beaucoup d’oiseaux une mort lente de faim et de soif. Un manque d’exercice, combiné à la fuite de devoir pondre un nombre obscène d’œufs, conduit souvent à une santé osseuse fragile et même à l’ostéoporose.


Poules entassées dans des cages à ponte. Notez les os fragiles et la perte de plumes, provoqué par la dépravation physique et les lourdes exigences de ponte.

Les alternatives aux cages à ponte – tels que les systèmes sans cage ou plein air – ne sont rien de moins que des labels de marketing, et ne confèrent pas de bénéfices au bien-être des animaux. La ‘production’ au sol, par exemple, implique l’entassement de centaines de milliers d’oiseaux dans un hangar géant. Les cages individuelles sont remplacées par une cage géante, et la surpopulation est toute aussi mauvaise. Les combats et le cannibalisme sont répandus, et le manque d’espace signifie que les oiseaux pissent, chient, et se marchent dessus.


‘Plein-air’ est également un label dénué de sens. Il n’y a aucune définition légalement approuvée (ou exécutoire) de ‘plein-air’. En fait, les œufs commercialisés comme ‘plein-air’ impliquent de la violence et exploitation identique aux méthodes conventionnelles : 




Abattage


Le mythe végétarien – que le lait et les oeufs n’entraînent pas l’abattage – est tout simplement cela. Comme tous les animaux ‘de ferme’, les poules pondeuses sont dans l’antichambre de la mort. Elles sont maintenues en vie seulement aussi longtemps qu’il soit profitable de les maintenir en vie. Lorsque le cout de nourriture dépasse le bénéfice dérivé de leur ‘production’ d’œufs (toujours à une fraction de leur durée de vie naturelle), elles sont abattues.


Conclusion


La plupart des gens acceptent déjà les idées de base qui devraient les mener – seuls – au véganisme. Nous sommes tous d’accord qu’il est immoral d’infliger souffrance et mort ‘dispensables’ aux animaux. Mais manger des animaux et produits animaux (ou les porter, les utiliser, etc) n’est pas nécessaire :


"La  position  de  l’Association  américaine   de   diététique   est   que   les  alimentations    végétariennes    bien conçues  (y  compris  végétaliennes) sont bonnes pour la santé, adéquates sur  le  plan  nutritionnel  et  peuvent être bénéfiques pour la prévention et le traitement de certaines maladies. Les    alimentations    végétariennes bien conçues sont appropriées à tous les âges de la vie, y compris pendant la  grossesse,  l’allaitement,  la  petite enfance,  l’enfance  et  l’adolescence, ainsi que pour les sportifs."


En effet, nous acceptons tous que les animaux sont quelqu’un, par opposition à quelque chose.
L’élevage et l’utilisation de poules pour la ponte, avec tout ce que cela implique (santé compromise, souffrance, et mort), est une violation de leur droit à l’autonomie corporelle. Cela implique nécessairement de traiter des êtres sentients comme s’ils étaient des objets – quelque chose qui va à l’encontre des normes morales que la plupart d’entre nous prétendent accepter. Le véganisme comble la déconnexion morale en prenant à cœur la notion que les animaux sont quelqu’un par opposition à quelque chose.


La bonne nouvelle est que, au 21e siècle, vous pouvez préparer votre propre gâteau vegan et le manger. Vous n’avez pas besoin d’œufs pour faire de délicieux gateaux, biscuits et cupcakes !


D’autres plats traditionnels peuvent également être préparés sans œufs :










~


Si vous n’êtes pas vegan, envisagez s’il-vous-plaît de le devenir. Si il est immoral d’infliger souffrance et mort ‘dispensable’ aux animaux, alors – par définition – nous ne pouvons pas justifier de manger, porter, ou utiliser des animaux et produits animaux pour nos papilles gustatives, notre confort, notre sens de l’habitude, etc.


« Le véganisme ne revient pas à abandonner quoi que ce soit ou perdre quoi que ce soit. Cela revient à gagner la paix en vous qui provient de l’adoption de la non-violence et du refus de participer à l’exploitation des vulnérables. Le véganisme n’est pas un ‘sacrifice’. C’est une joie. » -- Gary L. Francione

4 commentaires:

  1. Bonjour Kwaice,

    Je n'ai pas lu cet essai du début à la fin mais seulement les quelques paragraphes sur la biologie reproductive des poules. Cette version s'est largement répandue depuis quelques années parmi les gens qui se préoccupent du bien des poules (et parmi d'autres qui s'intéressent davantage au nombre d'anges qui dansent simultanément sur la pointe d'une épingle, mais ça, c'est hors sujet ici). En fait, je veux souligner que, quand on vise à contrer une idée fausse largement acceptée et prêchée, il vaut mieux ne pas lui opposer d'autres idées tout aussi fausses. On peut tromper "some of the people some of the time" - fastoche. "All of the people some of the time - c'est moins facile mais répandu. Mais dans la configuration hypothétique d'une tromperie de portée universelle - "all of the people all of the time" - on tombe fatalement tôt ou tard sur une personne qui invalide la proposition de départ et l'édifice prosélytique s'écroule promptement, quels que soient ses mérites par ailleurs. On doit alors retourner à la case départ pour bâtir un argumentaire intégrant les corrections apportées par l'empêcheur de tourner en rond. Mais on aura perdu une part de crédibilité et on va devoir dépenser temps et énergie à la rétablir. C'est dommage - vita brevis, etc.

    Sur le sujet des poules pondeuses et leur production pléthorique d'oeufs, le premier biologiste-ornithologiste venu repère immédiatement la faille qui mine la démonstration proposée par l'auteur de cet essai. Si les poules pondeuses continuent, jour après jour, à pondre, en dépit du bon sens, ce n'est pas dû essentiellement à la sélection effrénée que leurs races ont subie mais à une constante de biologie aviaire qu'on retrouve chez les 9000 espèces d'oiseaux qui peuplent notre planète. J'essaierai de faire court.

    Le tatou à neuf bandes - attention ! ce n'est PAS un oiseau - donne naissance systématiquement à des quadruplés au terme de chaque gestation: deux bébés femelles et deux bébés mâles. Ouais, c'est bizarre ! Sont pas comme nous, hein ? (C'est d'ailleurs pour ça qu'on en fait des sacs à main pas chers un peu plus tard.) A côté de ça, une hippocampe remet à son partenaire quelques centaines d'ovules qui rencontrent dans la poche ventrale du mâle des spermatozoïdes pour devenir autant d'embryons. Au terme d'une couvaison-gestation de quelques semaines, le père livre à l'océan quelques centaines de bébés hippocampes. Oui, mais les poules ?

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  2. Anon.Cont.

    Parmi un grand nombre d'éléments qui caractérisent chaque espèce d'oiseau figure ce qu'on appelle la "taille de ponte". La Kiwi pond UN oeuf par ponte, tout comme des colibris, ou le Fou de Bassan. D'autres espèces, dont les pigeons, font une ponte de DEUX oeufs. Certaines goélandes pondent TROIS oeufs chaque année. Et ainsi de suite jusqu'aux espèces de gallinacés qui détiennent des records: un nid de Caille de Virginie contenait 28 oeufs ! (Je crois ...)

    La taille de ponte résulte essentiellement de l'évolution de l'espèce. Elle est corrélée à la longévité et à des aspects sociaux, écologiques, géographiques, etc. Chez Gallus gallus, notre poule domestique et même notre coq gaulois, en nature la ponte comporte une dizaine d'oeufs en moyenne, mais ça varie en fonction des races notamment. D'autre part, certaines espèces d'oiseaux ne font qu'une ponte annuelle, d'autres deux, et ainsi de suite. Il se trouve que chez la plupart des espèces, même celles qui normalement ne produisent annuellement qu'UNE ponte, si la première ponte est détruite par accident, vol ou prédation, une PONTE de REMPLACEMENT est produite. Et voilà l'explication fondamentale à ce phénomène de ponte ininterrompue jusqu'à la mort qui caractérise les poules pondeuses modernes dans notre économie productiviste spéciste. Si on ne leur subtilisait pas leurs oeufs, avec ou sans "fécondation", les poules arrêteraient de pondre dès que leur ponte serait complète, et ensuite, ayant jugé que le nombre de leurs oeufs convenait, elles se mettraient illico à couver cette ponte fécondée ou non. Après 21 jours (+/-), dans le cas d'oeufs fécondés, elles accueilleraient leurs poussins et ensuite les élèveraient jusqu'à leur indépendance. Dans le cas contraire ("oeufs" non "fécondés") elles continueraient à couver leur ponte, longtemps, très longtemps, car les poules aussi espèrent.

    Tant qu'on prendra à une poule chaque oeuf qu'elle pond elle continuera à pondre un oeuf par jour jusqu'à disposer d'une ponte complète qu'elle pourra couver. Cela vaut pour beaucoup d'espèces, mais pas pour toutes. D'autres facteurs interviennent, comme la disponibilité alimentaire, la saison, le nycthémère, l'impérieuse nécessité de migrer.

    Il va de soi que mes propos ne peuvent qu'être une simplification de la réalité mais ils ne sont pas faux. Je n'ai pas le temps d'élaborer davantage mais en cas de besoin je peux le faire et je peux contrer les arguments fallacieux. C'est vraiment important de s'informer et de ne pas colporter des contre-vérités, même si on est de bonne foi. Il ne faut pas prêter le flanc à l'attaque. Prévoir et savoir au mieux car "on" nous attend au tournant.

    Cordialement,

    orynque

    PS: Je sais, bien sûr, que Kwaice n'est pas l'auteur de l'essai.

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  3. Très très intéressant. Merci pour les infos précieuses !

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  4. Effectivement, affirmer des choses fausses nuit au véganisme.

    L'article commence mal lorsque l'auteure affirme que : "Toutes les poules utilisées pour la ponte – incluant les poules d’arrière-cour et soi-disant ‘plein-air’ – débutent leur vie dans un endroit appelé un couvoir.". Pourquoi "toutes" ? Certaines naissent sous leur mère.

    De plus, l'oeuf est certes un ovule (fécondé ou non) mais l'expression "menstruations de poules" est fausse aussi.

    Il serait donc préférable que les auteurs vegans s'en tiennent aux arguments éthiques lorsqu'ils ne maîtrisent pas les sujets scientifiques.

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